La Princesse Barouline

...et son orgue de Barbarie

Feu de vigne... (Gaston Couté)

Ils avaient de très belles vignes
Dont le vin loyal et rosé
Etait couleur de leur baiser :
Leurs vingt ans furent doux et dignes ;
Puis, champ par champ, pièce par pièce,
Dans le sol de pierre à fusil
La vigne est morte de vieillesse,
Et le bon temps est mort aussi.

Refrain :
Y a plus de vin dans le cellier !
Y a plus d'amour sous l'oreiller !...
Mais (jette une souche, la vieille !)
Une flamme rose ensoleille
Leur âtre et leur coeur de janvier.

L'esprit du bon Vin qu'ils révèrent
S'en vient pour eux flamber encor
Parmi le feu de sarment mort
Comme il a flambé dans leurs verres.
Leur Passé, sur leurs lèvres blêmes,
Brûle à ne pouvoir préciser
Si ce qui s'envole d'eux-mêmes
Est un mot ou bien un baiser.
(au refrain)

Devant la flamme enchanteresse
Le vieux buveur qui ne boit plus
Sent, parmi ses membres perclus,
Couler les douceurs de l'ivresse ;
Et la Vieille dont la pensée
S'échauffe au feu du souvenir
Sent battre en sa pleine poitrine usée
L'Amour qui ne veut pas mourir.
(au refrain)

Ils avaient de très belles vignes
Dont le vin loyal et rosé
Etait couleur de leur baiser :
Leurs vingt ans furent doux et dignes ;
Et dans l'attente de l'épreuve
Qui doit faire passer un jour
Leur âme en quelque vigne neuve
Au vin clair comme un peu d'amour...
(au refrain)